Coupures d’électricité et d’eau au Gabon : Entre promesses d’enquête et frustrations populaires, le défi de la transparence et de la responsabilité

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La crise persistante des coupures d’électricité et d’eau : un défi majeur pour le gouvernement gabonais

Depuis plusieurs mois, les Gabonais vivent une série de coupures d’électricité et d’eau qui plongent les ménages, les entreprises et l’administration dans le chaos. Ces délestages récurrents affectent gravement le quotidien, paralysant le fonctionnement des institutions, freinant le développement économique, et alimentant un climat de méfiance envers la gouvernance. Au cœur de cette crise, la société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG), opérateur privé en charge de la distribution, est pointée du doigt. Plus encore, derrière ces interruptions se dessine une problématique plus profonde : celle de la transparence, de la responsabilité et de la gestion exemplaire des ressources publiques.

Nouveau rebondissement, le ministre de l’Accès Universel à l’Eau et à l’Électricité, Philippe Tonangoye, a récemment décidé de lancer une enquête approfondie visant à faire toute la lumière sur ces dysfonctionnements, tout en menant des investigations pour des motifs plus graves. Toutefois, cette annonce soulève de nombreuses questions, alimentées par l’histoire récente de la gestion de cette société et par un contexte politique en pleine mutation.

Une promesse d’audit oubliée dans la transition : une confiance érodée

Lorsque la crise a commencé à atteindre des proportions alarmantes, en août 2024, le porte-parole du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) avait promis aux populations un audit complet de la SEEG. Leur objectif était clair : éclaircir la gestion de l’entreprise, identifier les responsables, et mettre fin à ces dysfonctionnements chroniques. La décision, alors présentée comme un geste de transparence et de responsabilisation, semblait marquer une étape décisive dans la lutte contre l’impunité.

Mais voici le problème : cette promesse a été faite alors que le Gabon traversait une période de transition politique, sous administration provisoire. Quelle crédibilité pouvait-on alors accorder à une telle annonce dans un contexte où les institutions étaient encore en gestation, et où la volonté politique n’était pas encore pleinement consolidée ? Depuis lors, le pays a connu l’élection d’un nouveau président, la mise en place d’un gouvernement de la Vème République, et une normalisation institutionnelle qui devrait renforcer la confiance. Pourtant, l’audit promis reste en suspens, et la population se retrouve avec une immense frustration : la promesse d’une transparence effective a été trahie, ou tout au moins, mise en veilleuse.

La nouvelle annonce d’enquête : une réponse en décalage avec les attentes du peuple

Malgré cela, le ministre Tonangoye affirme aujourd’hui qu’une nouvelle étape sera engagée : une enquête approfondie, pour déterminer si des actes de sabotage, de collusion ou de violence douce ont eu lieu dans la gestion de la SEEG. Il parle même d’une implication des services spéciaux et de la gendarmerie pour assurer une enquête « sans complaisance ». La question est alors évidente : pourquoi parler d’enquêtes, alors que l’audit promis il y a quelques mois n’a jamais été rendu public ? Pourquoi ne pas d’abord publier le rapport d’audit qui aurait dû servir de base Objectif : faire la lumière sur la gestion passée et présente de la société avant d’ouvrir de nouvelles enquêtes qui risquent de faire perdre encore davantage la confiance des citoyens ?

Le peuple, excédé par ces dénis de transparence, se demande : “Que se passe-t-il réellement ? Pourquoi annoncer une enquête et ne pas rendre compte des résultats de l’audit promis ?” L’annonce d’un nouvel audit ou d’une enquête doit s’inscrire dans une démarche cohérente, avec des résultats concrets. Sinon, elle ne pourra que renforcer la suspicion, le cynisme et l’idée que tout cela est uniquement destiné à faire diversion.

La gestion opaque de la SEEG : un problème déjà ancien et profondément enraciné

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L’histoire récente de la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG) est malheureusement jalonnée d’enquêtes dispendieuses, souvent annoncées avec éclat, mais dont les résultats tardent à voir le jour, laissant planer une profonde suspicion sur la transparence et l’intégrité des opérations. Ce cycle répétitif, alimenté par des promesses non tenues, contribue à entretenir la défiance d’un peuple qui subit quotidiennement les conséquences de cette gestion opaque.

En août 2024, une plainte contre X pour détournement de tickets Edan, sorte de fraude électronique liée à la facturation de l’électricité, avait été lancée. La procédure avait été vivement relayée par certains responsables, mais, depuis, aucune communication officielle n’a été faite, et le résultat de cette enquête n’a jamais été divulgué. Cette opacité alimente le cynisme populaire : jusqu’à présent, aucune sanction n’a été annoncée, aucune responsabilité n’a été engagée, et donc la question demeure : à quoi ont servi ces démarches si elles ne débouchent sur aucune transparence ou conséquence concrète?

Par la suite, sous la pression d’une situation d’urgence croissante et de demandes citoyennes de résolution de la crise, le gouvernement avait promis la mise en place d’un audit en profondeur de la gestion de la SEEG. Pourtant, malgré cette promesse officielle, aucune communication précise n’a été faite concernant la publication des résultats. Le silence qui a suivi a renforcé l’impression qu’il y avait un « trou noir » volontaire autour des réseaux de gestion et de contrôle de cette société.

Plus récemment, en février 2025, une nouvelle polémique a éclaté avec l’évocation d’un sabotage d’une centrale thermique à Alénakiri. Des responsables gouvernementaux et des représentants du secteur avaient alors évoqué la nécessité d’investigations sérieuses pour faire toute la lumière. La gendarmerie a été mobilisée, des enquêtes ont été ouvertes, et des instructions ont été données pour identifier d’éventuels responsables. Pourtant, à ce jour, aucune conclusion officielle n’a été communiquée, et les citoyens se demandent si ces investigations ont été véritablement menées à leur terme, ou si elles ont été laissées en suspens pour des raisons obscures.

Ce cycle d’enquêtes inabouties ou de communications à géométrie variable illustre un problème plus vaste : celui de la mauvaise gouvernance, de la corruption latente, ou simplement du manque de volonté politique d’engager des responsabilités concrètes dans un secteur aussi vital que celui de l’énergie. La crainte majeure est que cette opacité ne soit pas simplement la conséquence d’une gestion défaillante, mais aussi un moyen de dissimuler des pratiques peu reluisantes, voire des détournements de fonds.

Dans ce contexte, chaque nouvelle annonce d’enquête intervient comme une étape parmi d’autres dans une longue série de gesticulations, alors que les populations attendent des actes plutôt que des discours sporadiques. La frustration est grande. Les Gabonais veulent des réponses claires : “Qui a détourné l’argent du peuple ?” “Qui a créé ces dysfonctionnements répétitifs ?” “Pourquoi la vérité n’est-elle jamais révélée ?”

La nécessité d’un vrai changement : aller au-delà des promesses

Ce cycle d’enquêtes non abouties ou éludées pose une question fondamentale : jusqu’à quand continuer à jouer la comédie ? La crédibilité du gouvernement en dépend, mais surtout celle des institutions de l’État. La transparence, la responsabilisation et la lutte contre la corruption doivent devenir de véritables priorités.

Il est aujourd’hui évident qu’avant d’annoncer de nouvelles investigations, le gouvernement doit mettre en avant les résultats de l’audit déjà promis. Une publication claire, transparente et accessible à tous permettrait de répondre à la question essentielle : “Qu’est-ce qui s’est passé dans cette société ?” Au lieu de multiplier les annonces, il faut s’engager à faire toute la lumière, à engager des responsables et à sanctionner ceux qui ont aggravé la crise ou détourné des ressources.

Les Gabonais ont le droit de savoir : quelles responsabilités ont été établies, quels responsables ont été identifiés, et quelles mesures ont été prises pour remédier aux dysfonctionnements. Se contenter d’annoncer de nouvelles enquêtes sans répondre à ces questions, c’est maintenir un climat de méfiance, et alimenter la crise de légitimité des institutions. Il est donc impératif que le gouvernement fasse preuve de transparence totale, publie les résultats des audits précédemment promis, et engage des actions concrètes pour restaurer la confiance du peuple. La crédibilité de l’État, aujourd’hui mise à rude épreuve, dépend de sa capacité à agir avec sérieux, rigueur et responsabilité. Sinon, ces annonces resteront à jamais perçues comme de simples gesticulations, et le malaise social ne fera que s’amplifier, au détriment de la stabilité et du développement du pays.

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