Déguerpissements des citoyens : un défi moral et juridique pour un développement responsable
La réalité des déguerpissements : un enjeu humain et juridique majeur Les opérations de déguerpissement, lorsqu’elles touchent des citoyens ayant investi leur travail, leur temps et leur argent dans un terrain ou un bâtiment, posent des questions fondamentales sur le respect des droits, la justice et la responsabilité de l’État.

Trop souvent, ces opérations se font dans l’indifférence ou l’absolutisme, sans respecter les lois en vigueur ou sans assurer un accompagnement digne aux personnes concernées. Il ne suffit pas de déclarer qu’un terrain appartient à l’État ou que des travaux de construction sont nécessaires pour justifier une expulsion immédiate, souvent discrète ou brutale. Une telle attitude crée un climat d’injustice, d’inégalité et de méfiance. En tant que citoyen ou gestionnaire public, il est essentiel de se rappeler que toute démarche de déguerpissement doit reposer sur un cadre légal strict, respectueux des droits fondamentaux, et avec une volonté sincère de négociation et de compensation.
La loi est claire : respecter les droits des occupants légitimes Selon la législation en vigueur dans la plupart des pays, y compris au Gabon, toute procédure de déguerpissement doit respecter un délai raisonnable et offrir à l’occupant la possibilité de se préparer à quitter les lieux. En général, cela implique un préavis d’au moins trois mois, permettant à l’occupant de s’organiser, de négocier ou de rechercher une alternative. Il est également crucial de distinguer ceux qui ont un titre foncier, un acte ou une reconnaissance officielle de leur propriété.
Ces personnes, lorsqu’elles prouvent leur droit par un document légitime, ne doivent pas être évincées arbitrairement. Leur investissement, parfois sur plusieurs années, doit être considéré comme une valeur à préserver. En cas de refus d’indemnisation ou d’expulsion injuste, la justice doit intervenir pour faire respecter leurs droits. La gestion responsable des dédommagements Lorsque l’État décide de récupérer un terrain, il doit également prendre en compte la valeur réelle de la propriété, qui peut largement augmenter avec le temps.
Un terrain acheté à 50 millions de CFA en 1985 pourrait valoir plusieurs centaines de millions dans les zones urbaines centrales en 2025. De ce fait, le montant du dédommagement doit refléter cette évolution, en intégrant la valeur marchande actuelle et les investissements réalisés par le propriétaire. Il ne s’agit pas simplement de donner une maison de substitution ou une petite indemnité insignifiante. La négociation doit s’appuyer sur une évaluation juste et équitable, garantissant à la fois une réparation complète du préjudice subi et la possibilité pour le citoyen de retrouver une stabilité financière et sociale. C’est une responsabilité morale et juridique que l’État ne peut pas évincer sous prétexte de « l’intérêt général » s’il ne propose pas une solution équitable.
Pourquoi l’État doit-il respecter la loi ?

Le respect du droit doit être la pierre angulaire de toute action publique, surtout lorsque celle-ci concerne la propriété privée ou le droit à un logement. Si l’État, gestionnaire de biens publics ou vendeur, viole ces règles, cela crée un précédent dangereux qui peut encourager des abus, des expulsions arbitraires et la marginalisation des plus vulnérables. Agir dans le cadre de la loi implique aussi d’établir le dialogue, la transparence et la négociation. Lorsque des documents légitimes existent, ils doivent servir de référence, et toute action doit respecter la procédure légale. Les autorités doivent faire preuve d’humanisme, de sensibilité et de clairvoyance, plutôt que d’actions expéditives ou de sanctions immédiates qui portent atteinte à la dignité humaine.
Que faire pour améliorer la gestion des déguerpissements ? Il est urgent que la gestion des terrains occupés par des citoyens respecte une série de principes fondamentaux :
• Respect de la législation : application rigoureuse de la loi en matière de préavis, de procédure et d’indemnisation. • Dialogue et négociation : engagement d’un vrai dialogue avec les occupants pour rechercher des solutions amiables.
• Evaluation transparente : évaluation juste de la valeur des biens immobiliers concernés, en tenant compte de leur situation dans le marché actuel.
• Indemnisation équitable : traitement juste des dédommagements, y compris en cas de perte totale ou partielle de propriété.
• Accompagnement social : mise en place de programmes d’aide pour ceux qui seront déplacés ou dont les habitations seront détruites, afin d’éviter la précarisation sociale.
La sensibilisation : un besoin urgent pour éviter les abus, réduire les conflits et garantir la justice sociale lors des opérations de déguerpissement. En informant en amont et de manière claire les citoyens sur leurs droits.