La gestion et la protection des terrains appartenant à l’État : enjeux, responsabilités et bonnes pratiques pour le développement national

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Qu’est-ce qu’un terrain appartenant à l’État ?

Un terrain appartenant à l’État est un espace terrestre dont la propriété est dévolue au domaine public ou privé de l’État. En droit, il s’agit d’un bien public qui doit être réservé pour des usages spécifiques au service de l’intérêt général : construction de routes, de bâtiments administratifs, écoles, hôpitaux, infrastructures publiques ou projets de développement économique et social. La particularité de ces terrains est qu’ils ne peuvent pas faire l’objet d’une propriété privée ordinaire, sauf exception prévue par la loi ou par une vente formelle accompagnée d’un acte notarié.

L’État doit donc préserver ces terrains, en assurant leur disponibilité pour des projets d’intérêt collectif. En même temps, il doit veiller à leur gestion rigoureuse, leur sécurisation juridique, pour éviter qu’ils soient occupés illégalement ou occupés volontairement par des citoyens qui pensent pouvoir y faire des investissements personnels sans respecter les règles.

Pourquoi certains terrains de l’État sont occupés par des compatriotes, malgré leur statut ?

Il est fréquent au Gabon, comme dans de nombreux pays africains, de constater que certains terrains appartenant à l’État sont occupés illicitement par des citoyens ou même parfois par des occupants qui ont acheté ou qui pensent avoir un droit d’usage à force d’occupation prolongée. Différents éléments expliquent cette situation :

  1. L’insuffisance de la gestion et de la sécurisation des terrains

L’État, parfois, manque de moyens ou de mécanismes efficaces pour surveiller, délimiter et contrôler ses terrains. Les domaines publics sont souvent mal cadastrés, mal balisés ou peu visibles. Cette absence de contrôle empêche d’empêcher ou de réprimer rapidement les occupations abusives.

  1. Le manque d’information et de sensibilisation des citoyens

Nombreux sont ceux qui, sans connaître précisément la réglementation, considèrent qu’un terrain vacant ou en zone peu contrôlée leur appartient puisque personne ne l’empêche d’y faire des aménagements. Quand ils voient que pas d’autorité n’intervient, ils investissent, bâtissent ou plantent des cultures, croyant agir dans la légalité ou à défaut dans la tolérance.

  1. L’attente de l’État face à ses terrains

L’État peut ne pas avoir de plans immédiats pour développer ces terrains. Dans ce contexte, certains citoyens profitent du fait que ces terrains restent en stand-by pendant des années, en y construisant leurs logements ou en y exploitant des activités économiques. La longue disponibilité du terrain sans utilisation immédiate d’un côté, et l’absence d’action ferme de l’État de l’autre, encourage cette occupation illégale ou délibérée.

  1. Le risque de conflit et les lenteurs administratives

Les procédures de recasement, d’expulsion ou de délimitation des terrains peuvent prendre beaucoup de temps, générant un sentiment d’impunité pour les occupants. Par ailleurs, certains citoyens considèrent que, malgré la légalisation, l’État peut tarder à leur faire valoir leurs droits, ou qu’elle pourrait faire marche arrière, ce qui les rassure peu à proposer leur propre investissement.

Pourquoi l’État ne lutte-t-il pas efficacement contre l’occupation illégale ?

L’État dispose souvent de moyens limités pour faire respecter ses terres, notamment en termes financiers et administratifs. La peur de confrontations sociales ou de conflits avec les occupants, surtout si ceux-ci sont installés depuis plusieurs années et ont investi dans leurs logements, peut également freiner les interventions fermes. Cependant, cela ne doit pas justifier l’inaction.

Il est fondamental que l’État revoit ses stratégies, en adoptant une gestion proactive et transparente. La question fondamentale est : pourquoi ne pas intervenir d’emblée pour empêcher l’occupation ? La réponse réside dans la nécessité d’une gestion claire, de bonnes stratégies d’information et de sensibilisation, et de la mise en place d’un cadre juridique strict et respecté, comprenant la délimitation précise et la sécurisation foncière.

La gestion du risque face à l’investissement informel sur les terrains de l’État

Des citoyens, face à l’absence d’action ferme et efficace de la part de l’État, tentent souvent leur chance en construisant sur des terrains appartenant à l’État, malgré leur conscience du caractère illégal de leur occupation. Certains cherchent même à se faire délivrer des papiers officiels ou des titres de propriété, pensant ainsi légitimer leur investissement, même s’ils savent pertinemment que le terrain ne leur appartient pas. Cette situation crée un paradoxe : d’un côté, l’État n’intervient pas assez rapidement, et de l’autre, certains citoyens prennent en otage ces terrains, croyant qu’investir malgré tout leur offrira une sorte de légitimité à leur occupation.

Pourquoi ces citoyens prennent-ils ce risque ?

Plusieurs raisons expliquent cette attitude :

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L’espoir d’un changement futur : certains estiment que l’État pourrait finir par céder ou régulariser cette occupation, surtout si une zone devient stratégique ou si la pression sociale ou politique s’accroît.
Les risques liés à l’absence de contrôle immédiat : en l’absence d’expulsion rapide, beaucoup pensent que l’occupation deviendra de facto légitime, surtout si l’État tarde à agir.
Le désir d’accéder à un logement : dans un pays où l’urbanisation rapide et la croissance démographique mettent la pression sur les logements, certains voient la construction sur un terrain non enregistré comme une solution à leur besoin de logement.
Les faibles coûts d’entrée : construire sur un terrain en zone peu surveillée peut sembler moins coûteux, et certains ne veulent pas attendre des démarches administratives longues ou coûteuses pour accéder à un logement officiel.

Le risque de laisser perdurer cette situation

L’investissement de citoyens dans des terrains appartenant à l’État, sans titre validé, pose plusieurs défis :

Perte de contrôle administratif et juridique : à force d’occupation longue, certains terrains peuvent sembler intégrés à la réalité du tissu urbain, rendant leur récupération plus complexe.
Risque d’insécurité foncière : en cas de conflits ou de contestations, la légitimité de l’occupation devient floue, ce qui peut entraîner des contestations ou des tensions sociales importantes.
Les investissements incohérents : le fait d’investir dans un terrain sans titre officiel peut aboutir à des pertes matérielles si, demain, l’État décide de récupérer ces terrains pour réaliser des projets d’intérêt général.

Conseils et propositions pour une gestion rationnelle et respectueuse de ces terrains

Pour l’État :
• Renforcer la gestion foncière et la délimitation des terrains : il faut digitaliser, cartographier et sécuriser tous les terrains publics pour éviter toute occupation non autorisée.
• Mettre en place une politique claire de prévention et d’interventions rapides : dès qu’un terrain non autorisé est identifié, des actions immédiates doivent être entreprises pour prévenir toute occupation illicite.
• Sensibiliser et communiquer : informer régulièrement la population sur la propriété publique, les dangers d’occupation illégale, et les démarches pour la régularisation ou l’acquisition légale d’un terrain.
• Faciliter l’accès à la propriété légale : instaurer des dispositifs simplifiés pour l’obtention de titres fonciers, notamment pour les populations vulnérables ou en majorité rurales.

Pour les citoyens :
• Respecter la législation foncière : avant de construire, il est impératif de vérifier que le terrain est disponible et qu’on détient bien un titre ou, au minimum, de demander conseil auprès des services publics compétents.
• Se rapprocher des autorités compétentes : plutôt que d’investir dans un terrain sans papiers, il vaut mieux faire une démarche officielle, obtenir un document de propriété ou un permis de construire, pour éviter toute contestation ou perte matérielle.
• Éviter l’investissement dans des terrains dont le statut est incertain : privilégier l’achat ou la location de terrains en zone réglementée et bien délimitée, pour garantir leur légalité et leur valeur à long terme.
• Contribuer à la protection de l’espace public : en étant vecteur d’informations, en dénonçant toute occupation illégale, et en participant à la sensibilisation autour de la propriété publique et privée.

Conclusion : Vers une gestion plus saine, transparente et respectueuse des terrains appartenant à l’État

Il est fondamental que l’État revoit ses stratégies de gestion foncière pour instaurer un encadrement ferme, clair et efficace, permettant de prévenir les occupations abusives et d’assurer une utilisation optimale de ses terrains. Cela implique la mise en place d’un cadastre moderne, la délimitation précise des zones réservées aux projets publics, et des mécanismes de surveillance réguliers pour détecter et réprimer rapidement toute occupation illicite. Par ailleurs, la sensibilisation des citoyens doit être renforcée pour leur faire comprendre que, même en cas de terrains inoccupés depuis longtemps ou en apparence inhabités, ces espaces appartiennent toujours à l’État et ne peuvent être occupés sans autorisation ou formalités légales.

En parallèle, l’État doit procéder à des campagnes de communication et de sensibilisation pour encourager la population à respecter la propriété publique, en insistant sur les risques liés à l’occupation illégale : incertitude juridique, pertes financières, risques d’expulsion ou de destruction des constructions. La régularisation progressive des terrains occupés de manière illicite, grâce à des dispositifs de titrisation accessibles, peut également contribuer à réduire la forte demande spontanée d’occupation sans titre.

Conseils pour les citoyens : agir avec responsabilité et respect des règles

Les citoyens doivent également adopter une démarche responsable. Avant de construire ou d’investir sur un terrain, ils doivent impérativement se rapprocher des autorités compétentes pour vérifier le statut juridique du terrain. Si un terrain est indiqué comme appartenant à l’État, il est crucial de respecter cette propriété, même si celui-ci reste inoccupé ou en état de délabrement depuis des années.

Investir sur un terrain sans titre officiel ou sans consultation préalable, c’est prendre le risque de perdre tout investissement, et pour ceux qui vivent déjà dessus, de se voir déloger ou de se retrouver en situation d’insécurité foncière. La faute n’est pas seulement du côté de l’État qui tarde à agir, mais aussi de la part des citoyens qui prennent un risque inconsidéré. La solution optimale consiste à suivre la voie légale : faire une demande de titre foncier ou d’autorisation de construire, attendre la réponse officielle, et respecter la réglementation.

Des solutions pour un avenir plus serein

Pour que la gestion et l’utilisation des terrains publics soient plus efficaces, plusieurs mesures doivent être prises, tant par l’État que par les citoyens :

Pour l’État :
Moderniser et digitaliser le cadastre national.
Créer un observatoire foncier pour suivre en temps réel l’état des terrains et prévenir les occupations illégales.
Établir un calendrier de délimitation et de développement des espaces réservés pour éviter que ces terrains restent inutilisés ou occupés indéfiniment.
Mettre en œuvre une politique d’expulsion rapide et respectueuse de la légalité pour protéger l’espace public.
Promouvoir des dispositifs légaux de régularisation pour ceux qui occupent illégalement, en leur proposant des titres ou des concessions régulières.
Pour les citoyens :
Vérifier le statut foncier du terrain auprès des services publics avant d’investir ou de construire.
S’engager à respecter la législation foncière et à privilégier les démarches légales d’acquisition ou d’autorisation.
Participer à la sensibilisation collective pour une meilleure compréhension de l’intérêt général et de la propriété publique.
Ne pas céder à la tentation de l’occupation illégale, même en cas d’attente ou de difficultés sociales.

pour une gestion responsable de la propriété publique

Gérer efficacement les terrains appartenant à l’État nécessite une volonté politique affirmée, une gestion rigoureuse, et la responsabilisation de tous les acteurs. La propriété publique doit être protégée, non seulement pour préserver l’intérêt national mais aussi pour assurer un développement durable, harmonieux et respectueux de l’environnement.

Les citoyens, quant à eux, doivent comprendre que l’investissement dans un terrain public sans titre officiel comporte des risques majeurs, et que la voie légale reste la plus sûre et la plus durable pour bâtir un avenir stable. La confiance doit être restaurée entre l’État et la population, à travers une gestion transparente, une communication claire, et une application stricte des lois.

Seule une approche équilibrée, basée sur la prévention, la régulation et la pédagogie, permettra de prévenir les conflits fonciers et de construire ensemble un paysage urbain et rural respectueux des lois et de l’intérêt général.

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